Les frères Ribeaupierre et Ribeauvillé
Les frères Ribeaupierre et Ribeauvillé
Deux seigneurs, qui étaient frères, vivaient jadis dans deux châteaux élevés face à face : le Saint Ulrich et le Girsberg. Depuis leur tendre enfance, ces deux hommes s’entendaient parfaitement bien. Ils s’estimaient mutuellement et partageaient la majorité de leurs loisirs : ils n’aimaient rien tant que chasser ensemble et déguster des banquets. Si, parfois, ils se disputaient un peu, leurs querelles ne duraient jamais, et ils se réconciliaient en riant au bout de quelques heures.
Comme leurs demeures n’étaient guère éloignées l’une de l’autre, ils avaient pris l’habitude, chaque matin, de se réveiller d’une façon tout à fait originale : le premier debout lançait, avec son arc, une flèche sur le volet du second pour lui signifier qu’il était temps de se lever.
Cependant, le plus jeune tomba un jour amoureux de la fille du roi des ménétriers, ces musiciens ambulants qui, à l’époque, animaient les fêtes dans les villages comme dans les châteaux. L’aîné, très fâché par ce qu’il considérait comme la perspective d’une mésalliance, se mit en colère. C’est en mauvais terme que chacun regagna son château. Après une nuit à cogiter et à sen vouloir, l’aîné tira la flèche de réveil au volet de son frère.
Tragiquement, c’est au même moment que son frère ouvrit à son tour la fenêtre et reçut droit dans le cœur la flèche. Fou de douleur, le jeune homme disparut dans la forêt, et on ne le revit plus jamais.
Mais les légendes alsaciennes racontent que chaque année, à l’anniversaire de ce triste jour d’octobre, on entendait, depuis la tombée de la nuit et jusqu’à l’aurore, les échos d’une chasse infernale dans la montagne autour des deux châteaux. On se remémorait alors tristement l’aventure des deux frères maudits, et personne ne se risquait à sortir jusqu’à ce que le jour soit levé, de peur d’être emporté par les fantômes.